Traditionnellement, la fête des mères et la fêtes des pères sont au calendrier entre mai et juin de chaque année. Nous observons à chaque fois de nombreux questionnements en lien avec ces deux évènements : Êtes-vous pour ou contre ? Quel est l’intérêt pour l’enfant ? Comment un enfant de trois ans (ou moins) peut-il se rendre compte de tout cela ? Comment faire avec des familles « non classiques » (Au passage c’est quoi une famille classique ? ) ….

 Au cœur de ces interrogations : les productions de contenus, le sens que cela a pour l’enfant ou encore la question de la composition familiale.

Aurélie ALLIO, éducatrice de jeunes enfants, coordinatrice du réseau de micro-crèches Crèche’n’do, formatrice petite enfance et co-fondatrice de Crèche’n’do Rencontres vous propose sa paire de lunettes :

Et si je vous disais que je n’étais ni pour ni contre et que l’important selon moi est tout le sens qu’on met derrière ces fêtes.

Non à la production de contenu.

Je me souviens d’une année (il y a fort longtemps) où nous attendions l’arrivée d’une enfant pour lui dire « Allez viens Pauline, tu vas faire ta peinture pour maman » ou encore « Viens faire ta pâte à sel, ça va faire super plaisir à papa ». Aujourd’hui, j’ai les oreilles qui saignent ou les yeux qui pleurent à l’évocation de cette situation. Et pourtant, c’est la triste réalité, nous demandons parfois à l’enfant de réaliser quelque chose pour faire plaisir à l’autre. 

En revanche, proposer un atelier peinture dont l’objectif du professionnel est la réalisation d’un cadeau pour la fête des mères/fête des pères me semble plutôt intéressant, à partir du moment où cela ne pose aucun souci qu’un enfant puisse refuser et que cela est bien compris de tous (professionnel et parent). J’ajouterais également que la proposition reste pertinente si elle est adaptée aux compétences de l’enfant, par exemple : prendre la main d’un bébé de trois mois, la tremper dans la peinture et déposer l’empreinte sur une feuille est différent de d’accompagner le geste d’un enfant de trois ans qui a la possibilité d’effectuer ces gestes par lui-même. Mais l’important est, encore une fois le plaisir de faire, de découvrir, d’expérimenter plutôt que le résultat final.

 

Et finalement, avec un peu de recul, lorsque le parent reçoit son cadeau, il remercie l’enfant certes mais qui d’autres ? Le professionnel ! N’est-ce pas là un besoin de reconnaissance caché ? Ne proposons-nous pas ce type d’expérimentations dans le but de faire valoir notre travail aux yeux de l’autre ?

Oui à la valorisation du rôle parental et oui à la prise en compte de la composition familiale de chacun.

Vous n’êtes pas sans savoir que les compositions familiales peuvent être différentes : familles monoparentales, homoparentales, hétéroparentales. Il n’en reste pas moins que chacun est un parent, mais parfois il n’y a pas de maman ou de papa. Il me semble donc essentiel de revoir les propositions tout en permettant à l’adulte de se sentir reconnu dans son rôle parental.

En effet, à quel parent cela n’a-t-il pas fait plaisir de recevoir une douce attention de son enfant (même une production 😊) ? Certes personne ne devrait en avoir besoin mais dans les faits c’est aussi tellement agréable d’être reconnu en tant que parent.

Quoi de plus magique d’observer un parent enlacer son enfant après avoir reçu ce “cadeau”, de voir les yeux de l’enfant qui brillent lorsque son parent lui dit “merci” ?

Au-delà d’une production à remettre à l’adulte, je parle ici de relation parent/enfant et non du cadeau en lui-même (je rappelle que je ne suis pas fan du faire pour “faire plaisir”). En effet, l’essentiel n’est-il pas de contribuer au lien parent/enfant ? La production n’est-elle pas un support comme pourrait l’être un temps d’expérimentation partagée ? Un moment de la journée en mode “petite souris” où le parent investit l’espace pour partager cela avec son enfant ? Ou tout autre support permettant au parent et l’enfant d’être reconnu dans ses compétences ? Soyons créatifs, il en existe tout plein des idées 😊

Et pourquoi ne pas voir les choses en grand avec la semaine des gens que l’on aime ? 

Cet évènement est proposé depuis 5 ans dans les micro-crèches dont je suis coordinatrice. Il peut être accompagné par la fête des mères/fête des pères ou non. Il me semble important de laisser le choix aux équipes de faire en fonction de ce qui fait sens pour elles, à partir du moment où l’intérêt de l’enfant et la valorisation du rôle parental sont au cœur de la réflexion. Certaines font les deux, d’autres seulement la semaine des gens que l’on aime, et c’est ok.

Cette semaine est banalisée entre la fête des mères et la fêtes des pères pour célébrer les gens que l’on aime, Maman, papa mais pas seulement : Papy, mamie, tonton, tata, beau papa, belle-maman …. Bref, tous les gens qui sont importants pour l’enfant !

 À l’instar de la semaine nationale de la petite enfance l’important est ici de porter réflexion sur la mise en œuvre, l’organisation d’ateliers créatifs, des moments festifs, d’expérimentations partagés, de laisser la possibilité aux familles d’animer une activité de leur choix (jardinage, comptines signés, jeux de société…), d’ouvrir la crèche sur certains temps forts (en mode petite souris)

Finalement, un peu tout ce qui laisse place à la rencontre, au partage, au plaisir d’être ensemble et en prime vous gagnez une belle cohésion d’équipe ! N’est-ce pas toute la définition de la co-veillance : permettre à chacun de sentir bien, respecté dans son besoin et reconnu dans ses compétences ?

Aurélie Allio